Né en 1944, Alan Stivell s’est d’abord appelé Alain Cochevelou.
Ses aïeuls, natifs de Gourin, dans l'ouest intérieur de la Bretagne, avaient quitté la ferme familiale pour émigrer à Paris, comme tant d’autres bretons. Le père d'Alan, Georges Cochevelou, traducteur, inventeur et fin lettré, nourrit l’ambition de faire renaître la pratique de l’antique harpe celtique, tombée dans l’oubli à la fin du Moyen-Age.
Après des années de recherches, Georges Cochevelou réussit à fabriquer un prototype, équipé de cordes en nylon, et soigneusement décoré de motifs empruntés à la tradition celte.
L’intérêt naissant que le jeune Alan commence à porter à la culture celte l’incite bientôt à apprendre à jouer de la bombarde et de la cornemuse. Dès 1955, s’accompagnant lui-même à la harpe, Alan Cochevelou se produit régulièrement sur scène, entre autres à l’Olympia, où il donne un spectacle en solo, alors qu’il n’a même pas douze ans... Saluant dûment l’exploit, le premier enregistrement de harpe celtique sort dans la foulée.
En 1961, Alan prend la direction du Bagad Bleimor, qui devient très vite le plus renommé de la région : l’ensemble rafle les premiers prix de tous les festivals de musique traditionnelle, et se produit dans tous les concerts et autres fest-noz, en compagnie de Youenn Sicard, le compère d'Alan. Pourtant, il est bientôt évident que ce dernier n’est pas destiné à se limiter au cadre étroit de la musique traditionnelle. Tout en cultivant ses propres racines celtes, et en approfondissant ses connaissances musicales en la matière, il apprend le gaëlique et l’anglais, et devient aussi un fervent lecteur de science-fiction et de bandes dessinées, et, bien sûr, un fan de rock’n’roll. Autant d’influences majeures qui éclaireront dès lors toute sa carrière.
En 1966, Alain Cochevelou échange son nom contre celui d’Alan Stivell. Il entame une série intensive de concerts et signe un contrat avec Philips un an plus tard. De cette association sortiront deux albums, ‘Reflets’ en 1970, et ‘Renaissance de la Harpe Celtique’, en 72, à qui la France et l’Amérique du Nord réserveront un accueil étonnamment favorable.
En 1972, les 1.500.000 exemplaires vendus de ‘Olympia Concert’ propulsent dans un même élan Alan Stivell et la musique bretonne à la place que l’un et l’autre méritent au sein des cultures populaires.
Après le succès de l'album ‘Olympia Concert’, Alan Stivell consacre la fin des années 70 à se tailler une renommée à l’étranger, partant en tournée en Europe, au Canada et en Australie. Les trois albums suivants sont tous disques d’or : ‘Chemins de Terre’ en 1973, ‘E Langonned’ en 1974 et ‘Live In Dublin’ en 1975.
En 1975, afin d’assurer le contrôle de ses propres productions, Alan Stivell crée son label, Keltia III.
La harpe électrique a fini par voir le jour au début des années 80, et Alan Stivell l’a abondamment utilisée pour l’album ‘Harpes du Nouvel Age’. Au bout du compte, ce sont plus de dix harpes différentes qu’il a successivement conçues, et il est actuellement en train de parfaire la mise au point d’un synthétiseur-harpe midi, une création originale à laquelle il se consacre depuis bientôt vingt ans.
Lors du Festival Interceltique de Lorient, en 1980, avec sa ‘Symphonie Celtique’, interprétée sur scène par un orchestre de 300 musiciens, devant un public de 10.000 personnes, Alan Stivell atteint une sorte de sommet créatif. Cet événement ambitieux, succès artistique autant que commercial, faisait suite à la sortie, en 1979, de l’album du même nom, enregistré par une formation plus restreinte de 75 musiciens. Cette symphonie est l’ultime expression des sentiments qu’Alan Stivell éprouve à l’égard de son identité bretonne, et de la place qui lui revient dans un contexte culturel plus vaste. Aujourd’hui, il continue à revendiquer passionnément l’héritage celte, et ses connaissances historiques, linguistiques et musicales font de lui un érudit en la matière.
Au début des années 80, après trois albums sortis sur le label Keltia III : ‘Terre des Vivants’ en 1981, ‘Légende’ en 1983, et ‘Harpes du Nouvel Age’ en 1985, Alan Stivell s’accorde une retraite sabbatique de six ans, loin des feux de la rampe.
En 1987, Alan Stivell signe un contrat de distribution avec les Disques Dreyfus, label français indépendant. Il sort alors un premier album avec ses nouveaux partenaires, sous la forme d’un hommage au plus célèbre des mythes celtes, la légende du Roi Arthur. ‘The Mist Of Avalon’ sort en 1991. En 1993, paraît ‘Again’, une sorte de mise en perspective de sa propre production : il ré-enregistre ses morceaux les plus connus, entouré d’invités, dont Kate Bush, Shane Mc Gowan, le maître es cornemuse Davey Spillane, le percussionniste africain Doudou N’Diaye Rose, Laurent Voulzy et Gilles Servat. ‘Again’ est disque d’or en France, et plus de 300 .000 albums seront vendus, partout dans le monde. Ce disque marque le retour d’Alan Stivell : de toute évidence, il est en grande forme!
‘Brian Boru’, sorti en 1995, est l’illustration parfaite des interrogations d’Alan Stivell. Les dix standards de musique celtique se sont ainsi vus attribuer un traitement de faveur, rigoureusement moderne et cosmopolite, passent du souffle grandiose de l’épique ‘Land Of My Fathers’ (auquel ont virilement participé les 15.000 spectateurs gallois enregistrés pendant un match au Cardiff Arms Park) aux charges rythmiques de la ligne de basse de ‘let The Plinn’ et ‘Sword Dance’. Scrupuleusement intègre, Alan Stivell tient le cap du Renouvellement Créatif Constant.
‘1 Douar’ (‘une Terre’ en breton), disque-évènement sorti en 1998, se veut résolument celte mais aussi métisse et futuriste. En préparation depuis 2 ans, cet album a été enregistré entre Rennes, Rotterdam, Dublin, Londres, Paris et New York avec une pléiade d'invités prestigieux : Youssou N'Dour, Khaled, John Cale, les Soeurs Goadec, Jim Kerr, Paddy Moloney, etc... Avec ‘1 Douar’, terre de rencontres et de fusions, Alan Stivell est un homme en avance, déjà dans le troisième millénaire.
En 2002, sort son quatrième album instrumental, Au-Delà des Mots, grand moment de poésie musicale.
Au fil des années, il a gardé intactes les mêmes passions : la musique, la technologie avancée, ses racines celtes et sa capacité à se renouveler. La musique progressant à présent dans de multiples directions, grâce aux nouvelles techniques, les artistes redécouvrent à la fois les origines de leur art et l’infinie variété des ressources sonores disponibles autour d’eux. Alan Stivell, lui, est en train d’occuper pleinement la place qui lui revient de droit.