Il est peu de disques aussi troublants que celui-ci.
On savait, depuis longtemps, que Biréli Lagrène n'en avait pas fini avec Django, avec ce jazz-là - les aficionados, qui avaient eu la chance de l'entendre jouer lors de boeufs "after hours" ou de réunions familiales, mais aussi, plus récemment et plus largement, le public des Nuits de la Guitare de Patrimonio par exemple, à qui il avait fait le bonheur de telle version, sidérante, de All The Things You Are, interprétée sur une guitare type Selmer (cette fameuse guitare française que nous envient les Anglo-Saxons) -. Aficionados ou non, ce qui frappait alors, ici ou là, c'était l'engagement étonnant du guitariste dans le "faire" de la musique, comme une espèce de retour au sacré (car, chez les Manouches, le rapport à Django n'est pas loin de la religion, comme tout ce qui touche, de près ou de loin, aux fondements de la communauté).
Regardez le front de Biréli : ce mélange impressionnant de gravité soudaine et de candeur juvénile, parfois rehaussé d'un trait d'humour, -que pouvaient observer, quelques heures avant la première séance prévue pour cet enregistrement, les spectateurs du Zénith de Montpellier lors de la prestation à la fois préparatoire et inaugurale du "Gipsy Project" - on jurerait retrouver celui qu'il y a une vingtaine d'années nous révélait la scène du théâtre du Châtelet, pour son premier grand concert parisien.
Chez les Gitans plus qu'ailleurs, la musique est un partage. Il fallait donc, pour qu'une telle musique fût (à nouveau) possible, que Biréli s'entourât de frères, frères en amitié ou frères de race. C'est le cas du violoniste tsigane roumain Florin Niculescu, d'Holzmano Lagrène et d'Hono Winterstein aux guitares rythmiques, et du fidèle Diego Imbert à la contrebasse. Epaulé par cette équipe de choc, un nouvel horizon semble pouvoir se déployer pour le leader, à partir de la tradition la plus ancrée, la plus intimement parcourue, jusqu'au vertige. (Biréli ne nous confiait-il pas, tout dernièrement, que Django lui était apparu en rêve?).
En acceptant de se lancer dans ce "Gipsy Project", ce n'est pas seulement sur la mémoire de la musique elle-même que Lagrène s'est mis à travailler, mais, plus fondamentalement, sur ce qui touche à sa mémoire personnelle, à son identité profonde d'homme et de musicien (si une telle distinction est encore possible dans son cas).
On interprète parfois maladroitement ce qui, dans la culture tsigane, a trait à la virtuosité et à la passion instrumentale. On y voit souvent la manifestation (au mieux : généreuse) d'une gratuité apparente, sans remarquer que ce qui transparaît là, dans le geste instrumental, est avant tout affaire de mémoire et de transmission du corps. Mémoire de la transmission du corps (et donc de la pensée), souci aigu de la "chaîne" humaine (celle qui relie le musicien à ses ancêtres, aux ancêtres de ses ancêtres, etc…). En se rappelant à nous (et en nous rappelant à lui) par cette proposition audacieuse, presque folle, Biréli Lagrène a répondu à sa façon, c'est-à-dire comme il pouvait seul se le permettre, à l'éternelle question des guitaristes: celle de l'éternel retour de Django.
Max Robin
« Biréli revient à ses amours premières avec une maîtrise époustouflante. »
Télérama
« Essentiel. »
Le Monde
« Un vrai bonheur »
Femme Actuelle
«Ça c’est le jazz »
L’Express
1.Blues Clair02:42 (Django Reinhardt)
2.Coquette02:06 (John Green/Carmen Lombardo/Gus Kahn)
3.Si tu savais03:06 (André Salvet - Marc ANtoni/Georges Ulmer)
4.Belleville02:38 (Django Reinhardt)
5.Daphné (version longue)02:58 (Django Reinhardt)
6.Je suis seul ce soir05:09 (Jean Casanova/Noël Rose - Paul Vaudricourt)
7.Swing 4202:10 (Django Reinhardt)
8.Embraceable You02:27 (ira Gerschwin - George Gerschwin)
9.Vous et moi03:40 (Robert Bosmans/Etienne Lefebvre)
10.Festival 4802:54 (Django Reinhardt)
11.Viper's dream02:44 (Allen Fletcher)
12.What is this thing called love01:58 (Cole Porter)
13.La Mer03:32 (Charles Trenet)
14.Lime House Blues01:50 (Philip Braham/Douglas Furber)
15.Daphné (version courte)02:25 (Django Reinhardt)
Biréli Lagrène, Holzamno Lagrène, Hono Winterstein : guitares - Diego Imbert : contrebasse - Florin Niculescu : violon